Iel, mes marri‧e‧s !



C’est la dernière jolivetterie ¹ en date qui m’a fait prendre conscience de cette évidence : le pronom « iel » me va comme un gant ! En effet, si je ne doute aucunement de ma féminité triomphante, je n’oublie pas pour autant que je suis née entre les lignes de ce charmant poème adolescent :


être un homme être une femme

être les deux à la fois

et s’aimer tout‧e seul‧e dans un grand lit de soi‧e ²


Iel. Belle sonorité, signification limpide. J’ignore — comme tout le monde, n’est-ce pas ? — si ce nouveau pronom entrera largement dans l’usage ou s’il tombera dans l’oubli, mais quoi qu’il en soit je me fais sur-le-champ un plaisir de l’adopter, de me l’approprier même. Sans militantisme exacerbé (quoique…) ni goût de la provocation (re-quoique…), mais simplement parce qu’il me plaît et que je me reconnais dans ces trois lettres.


Alors peu m’importe que ce joli mot rende chèvres un pauvre député notoirement frappé d’inculture crasse, un ministre de l’Éducation qui semble avoir oublié la sienne ou une « première dame » dont le vibrant : « Deux pronoms, c'est bien ! » ³ fait comme un vilain écho au très primaire « Un papa, une maman » (un pronom, une pronomme ?). Ces gens-là, dont la langue est essentiellement constituée d’un mauvais bois, n’ont aucun pouvoir sur les mots.


Non plus d’ailleurs que ce distingué linguiste qui s’interrogeait gravement sur le dilemme suivant : faudra-t-il dire « iel est beau » ou « iel est belle » ? Allons allons, mon petit bonhomme, faites un effort, les solutions ne manquent pas :


Iel est d’une grande / singulière / étonnante beauté.

Iel surprend / séduit / agace / brille par sa beauté.

Iel est une belle personne.

Iel n’est pas laid‧e.


ou encore (et là, c’est moi qui parle) :


Iel se soucie comme d’une guigne du concept étriqué de beauté physique.


Comme quoi on peut se targuer de compétences linguistiques et ne pas savoir sortir la langue de sa poche…


Sur ces belles paroles, lecteur, lectrice, iel vous salue bien !


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1. Il aura l’air fin, MonDéputé, le jour où ce mot fera son entrée dans un dictionnaire…


2. Les points médians sont un ajout contemporain à ce texte datant d’une époque lointaine où l’on ne rêvait pas encore d’écriture inclusive.


3. Comment diable quelqu’une qui fut professeure de français a-t-elle pu oublier la diversité des pronoms de la troisième personne du singulier ?



25 novembre 2021

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